Sandra
Je vis à Halifax depuis 1987. J’ai travaillé à l’international comme comptable et conseillère… mais ma base était située sur la côte atlantique du Canada.
Les premiers signes
J’ai toujours eu une bonne mémoire. C’est à 51 ans que j’ai commencé à avoir des problèmes qui avaient des conséquences sur mon travail. Je perdais ma capacité à me concentrer et je ne me souvenais plus de comment me rendre au bureau de mes clients ou de comment apprendre les nouvelles lois fiscales.
Mon médecin a été très bonne et persévérante. Elle savait que j’avais des difficultés au travail, alors elle me renvoyait encore et encore à la clinique de la mémoire pour y passer des examens. Trois ans plus tard, à 54 ans, j’ai reçu un diagnostic de maladie à corps de Lewy et de la maladie de Parkinson.
C’est un peu de ma faute s’il a fallu tant de temps pour poser le diagnostic : ne pas dévoiler mes symptômes a été une très grave erreur. J’ai hésité à dire à mes médecins que j’avais des problèmes d’hallucination et d’équilibre. J’étais sûre que s’ils l’avaient su, ils m’auraient enfermée et jeté la clé.
Avant de recevoir mon diagnostic, je ne croyais pas que mes symptômes étaient liés à mes pertes de mémoire. J’espérais qu’il s’agissait d’autre chose. Au plus profond de moi, je savais toutefois que ça allait être une maladie cognitive.
Réaction au diagnostic
Quand même. Quand je l’ai appris, j’ai été sous le choc. J’en ai ri avec les médecins. Une de mes premières pensées fut : « Ah oui, une maladie cognitive? C’est quand on est vieux et qu’on est assis dans un fauteuil à bascule, qu’on vous enferme et qu’on ne sort jamais… non? »
Ces pensées étaient le résultat de la stigmatisation que j’avais créée dans mon esprit à l’égard des maladies cognitives. Elles se basaient sur une expérience que j’avais vécue quand j’avais 15 ans. À ce moment, j’étais bénévole à l’hôpital psychiatrique de Sydney en Nouvelle-Écosse. Là-bas, il y avait tellement de patients avec différents problèmes de santé mentale, y compris des patients atteints de troubles cognitifs à début précoce, et des patients au stade final de la maladie.
Maintenant que j’avais reçu mon diagnostic, j’étais sûre que c’est ce qui allait m’arriver. Je me suis graduellement retirée de plus en plus d’aspects de ma vie. Les activités auxquelles j’aimais participer ou les personnes avec qui j’aimais interagir ne m’intéressaient plus.
Après avoir contacté les membres du personnel de la Société Alzheimer d’Halifax en Nouvelle-Écosse, j’ai tout doucement surmonté mon sentiment d’impuissance. Ma fille, Lora, nous a inscrites au programme de la Société, « Shaping the Journey ». Grâce à des programmes comme celui-ci, j’ai repris confiance en moi et j’ai recommencé à socialiser et à sortir de ma coquille.
Les réactions des gens
Certaines des personnes que je connaissais depuis un certain temps ne savaient pas comment réagir. J’ai tellement souvent entendu « Tu es trop jeune pour ça! » J’ai remarqué que les gens m’appelaient et me rendaient moins souvent visite.
Mais les personnes qui sont encore dans ma vie comprennent. Ma famille me soutient beaucoup. Au début, les membres de ma famille avaient peur que ma maladie cognitive soit un trait génétique. Ils savent maintenant que je vais bien.
Le système de soins de santé
Étant données les histoires que j’avais entendues sur comment les personnes atteintes étaient traitées par les professionnels de la santé (p. ex. ne pas les écouter), je crois que j’ai eu de la chance. Les professionnels que j’ai consultés m’ont parlé ouvertement.
Parfois, lorsque ma fille est avec moi, ils s’adressent à elle en premier. Si ça se produit, elle demande au médecin de me poser directement les questions. Si j’oublie quelque chose, elle l’explique au médecin, ainsi que tout changement qu’elle remarque.
La vie avec une maladie cognitive
Je sais que lorsque j’ai fait quelque chose de fatigant, j’ai besoin d’une journée pour récupérer. Comme lorsque je suis avec mes petits-enfants super actifs. J’adore être avec eux et ne veux pas arrêter de les voir.
J’essaie de réfléchir et de faire des tâches plus compliquées le matin quand je peux mieux me concentrer. Les fins d’après-midi et les soirées sont mes moments de calme. Si on me dit quelque chose à ces moments-là, je l’oublie très vite. Je suis moins capable de comprendre une blague ou un sous-entendu.
J’ai un calendrier que j’emporte partout où je vais. De cette manière, je peux y inscrire toute nouvelle réunion ou tout nouveau rendez-vous avant de l’oublier, et je ne le perdrai pas, car je n’écris rien sur des petits morceaux de papier.
Je garde toujours avec moi un exemplaire de ma « carte-mémoire » de la Société Alzheimer : quand je passe une mauvaise journée et que j’ai du mal à dire les choses, je peux la montrer à la personne avec qui j’essaie de communiquer. Pendant qu’elle lit la carte, j’ai un peu de temps pour réfléchir à ce que je veux lui demander ou lui faire comprendre ce dont j’ai besoin.
C’est un outil très utile à avoir sur vous si vous êtes dans une file dans un magasin, dans le bus, ou dans un endroit qui pourrait être embarrassant pour vous : vous passez la carte à la personne à qui vous essayez de parler, et vous n’avez pas à parler de votre situation à voix haute.
J’utilise beaucoup l’Internet pour réapprendre certaines des choses que je connaissais et j’apprends sans cesse des nouvelles choses. Après tout, l’apprentissage continu améliore votre cerveau et votre mémoire!
Affronter la stigmatisation
J’ai été bénévole pendant 3 ans dans une bibliothèque où j’ai enseigné l’anglais seconde langue. Une personne a découvert que j’avais une maladie cognitive et a demandé à mon coordinateur si j’étais encore capable d’enseigner aux immigrants. Ils ont dit à mon coordinateur que puisque je perdais ma capacité à réfléchir et à m’exprimer correctement à cause de la maladie, ils ne voyaient pas comment j’étais encore capable d’aider les autres efficacement.
La stigmatisation est encore bien présente. C’est pourquoi j’aime défendre la Société Alzheimer : je peux raconter mon histoire. Dans cette histoire, je suis jeune et atteinte d’une maladie cognitive. Pouvoir changer l’opinion d’une ou deux personnes à la fois a beaucoup d’importance pour moi.
Dernières pensées
Vous devez savoir que chacun chemine à sa manière avec sa maladie. Ce cheminement n’est pas toujours des plus simples, mais on se définit par bien plus de choses que la maladie!
Et, malgré les différents types de maladies cognitives et les différents symptômes, nous partageons tous des similarités. Avec le diagnostic, nous vivons tous des changements et une grande perte, mais nous avons aussi l’opportunité d’apprendre et de gagner quelque chose.
Si vous êtes atteint d’une maladie cognitive, vous devez découvrir et connaître vos limites, pour que vous aussi puissiez bien vivre. Faites savoir aux autres que vous êtes encore une personne et qu’on doit discuter avec vous de toute décision qui vous touche directement. N’ayez pas peur de demander de l’aide.
Il y a tellement de changements dans la vie que nous vivons actuellement. Alors, soyez bon envers vous-même.
Voici mes conseils pour vous aider à comprendre :
- Parlez aux professionnels de la santé (votre médecin, ou le personnel à la clinique de la mémoire) de tous vos symptômes, même si vous n’êtes pas sûr s’ils ont quelque chose à voir avec votre mémoire ou votre cerveau. Dites-leur tout ce qui vous semble différent entre maintenant et avant. Ayez un petit carnet pour y inscrire les changements que vous observez et apportez-le quand vous vous rendez chez le médecin.
- Si vous perdez le fil de vos pensées et que vous ne vous souvenez plus de quelque chose… laissez tomber. Lorsque je suis avec quelqu’un, j’aime lui dire « J’ai perdu le fil de ma pensée… Parlons d’autre chose. »
- Peu importe l’endroit où vous vous trouvez; s’il y a trop de bruit ou trop de monde, demandez à aller dans un coin tranquille ou dans un endroit différent pour mieux pouvoir vous concentrer.
- Soyez actif socialement et physiquement. C’est non seulement bon pour le cœur et le cerveau, ça peut aussi améliorer votre humeur et allonger votre durée de vie.
- Changez votre manière de penser au sujet du vieillissement. Les attitudes positives à l’égard du vieillissement sont liées à une guérison et une récupération plus rapide, mais aussi à une vie plus longue. La tristesse et les maladies cognitives n’en font généralement pas partie. N’ayez pas peur de chercher de l’aide pour prendre soin de votre santé mentale.
-
Plus d'histoires
-
Anne
2018
Nouvelle-Écosse
-
Faye
2018
Nouvelle-Écosse
-
Sandra
2018
Nouvelle-Écosse
Commentaires
Nous pouvons utiliser vos informations afin de suivre votre relation avec nous et nos sites. Nous ne partageons PAS vos informations avec des tiers.